Cameroun : la Cevaa s'associe à la CMER dans un appel à la prière et à la solidarité
Division Géographique de la Direction des Archives du Ministère français des Affaires Étrangères - 2004. |
Le problème camerounais, présenté à tort comme une simple question linguistique, est en réalité un problème social et politique très ancien au Cameroun : il remonte à la défaite de l’Allemagne lors de la Première guerre mondiale. Les Alliés, la France et la Grande-Bretagne notamment, vont se partager la colonie allemande du Kamerun sous l’égide de la Société des Nations. Après l’indépendance du pays, les deux parties sous mandat français et britannique vont constituer une République fédérale avec deux États, l’un anglophone et l’autre francophone.
Mais la réunification des deux États en 1972 par référendum, et la proclamation du Cameroun en République unie de manière unilatérale par le chef de l’État par décret en 1984, vont être ressenties comme une simple annexion de la partie anglophone par la partie francophone. Les anglophones expriment depuis lors un mal-être. Les résurgences de ce mal-être sont à l’origine de la déclaration symbolique d’indépendance du Cameroun anglophone le 1er octobre et des manifestations qui ont suivi, dont la répression a fait des dizaines de morts et plus d’une centaine de blessés selon diverses ONG.
Ces manifestations avaient déjà été précédées de plusieurs crises aiguës. Enseignants et avocats anglophones avaient notamment manifesté pour protester contre la marginalisation des anglophones dans la société camerounaise. Le gouvernement avait réagi en accusant les leaders anglophones de terrorisme et, dénonçant des déclarations faites sur les réseaux sociaux, en coupant plusieurs mois tout accès internet dans les régions Nord-Ouest et Sud-Ouest du pays, majoritairement anglophones.
Face aux tensions croissantes, la Presbyterian Church in Cameroon - PCC, qui est membre de la Communion mondiale des Églises réformées (CMER) a publié récemment une déclaration officielle dans laquelle elle appelait à la solidarité pastorale et consacrait le dimanche 22 octobre comme journée de deuil. « Alors que la peur et l’incertitude menacent, que les émotions ont pris le pas sur la raison, que le caractère sacré de la vie humaine est profanée, alors que nous nous faisons plus d’ennemis que d’amis et que la division paraît devoir détruire l’unité de notre peuple, alors qu’il semble que la confiance mutuelle a disparu, nous rappelons à tous les Presbytériens et au peuple du Cameroun notre responsabilité collective et le rôle en tant qu’Église et en tant qu’individus dans ces moments éprouvants de notre pays et de notre histoire. »
Des mesures demandées pour « un dialogue résolu et sincère »
Pour aller plus loin : •Fiche d'Eglise : l'Église Évangélique du Cameroun•Fiche d'Eglise : l'Union des Églises Baptistes du Cameroun •Fiche d'Eglise : l'Église Évangélique Luthérienne du Cameroun |
Dans cette déclaration, la PCC demandait que soient prises un certain nombre de mesures permettant de sortir de la crise pour aboutir à « un dialogue résolu et sincère » :
- qu’une commission indépendante enquête sur les atrocités commises par l’armée et que les coupables soient châtiés conformément à la loi ;
- que les deux régions anglophones soient démilitarisées, que les arrestations arbitraires cessent ainsi que les perquisitions dans les domiciles privés, que les détenus soient libérés, que des fonds soient disponibles pour soigner les blessés, les malades, les mourants ;
- que tous les membres de nos Églises s’abstiennent de violence et deviennent instruments de la paix de Dieu dans un monde de haine, de violence et de guerre ;
- que l’on fasse un usage responsable des médias sociaux et des autres instruments de communication, sinon nous allons semer des graines de haine qui finiront en nettoyage ethnique ;
- que reprennent les cours dans les écoles, qu’on mette fin aux villes fantômes, et que la bonne volonté règne entre tous en vue d’éviter la violence, les épreuves imposée au public et la guerre.
« La PCC croit au dialogue, au dialogue sincère, à la paix dans la justice et à la vérité comme clés d’une vie paisible et de la cohésion sociale » poursuivait cette déclaration. « La PCC s’arroge la lourde responsabilité de constituer avec d’autres responsables d’Églises une plate-forme ouverte pour prendre contact avec le gouvernement du Cameroun en vue de jouer un rôle de médiation entre celui-ci et les représentants de la communauté anglophone. »
La CMER s’est associée à la PCC et « à nos sœurs et nos frères au Cameroun » ; elle a invité ses Églises membres à participer à la prière et au soutien, notamment durant le dimanche 22 octobre, conformément aux suggestions émises par la PCC.
La Cevaa qui compte trois Églises membres au Cameroun (Église Évangélique du Cameroun, Union des Églises Baptistes du Cameroun et Église Évangélique Luthérienne du Cameroun) s’associe également à ce message de la PCC et invite ses 35 Églises et Unions d’Églises membres à intercéder pour cette situation.