Centrafrique : première journée à Bangui pour la délégation Défap-Cevaa-Ceta
Un marché en Centrafrique © Jean-Luc Blanc, Défap
Un marché en Centrafrique © Jean-Luc Blanc, Défap |
La délégation Défap-Cevaa-Ceta, partie de France mardi matin, est désormais à pied d'oeuvre à Bangui où elle doit entamer ses premières visites en ce mercredi 2 avril. Le pasteur Célestin Kiki, secrétaire général de la Cevaa, a brièvement donné quelques nouvelles dans la nuit de mardi à mercredi : « Nous sommes bien arrivés à Bangui. Nous avons été accueillis par une forte délégation de l’Église (l'EPCRC, Église Protestante Christ-Roi de Centrafrique, membre de la Cevaa) composée du président, vice-président, secrétaire général, trésorière, Mathilde et deux jeunes. Le programme établi est bien chargé avec des moments de rencontres, d’animations bibliques, de visites de sites, de cultes...»
Cette visite, à laquelle participent également Thierry Muhlbach, président de la Cevaa, Jean-Arnold de Clermont, président du Défap et Simon Kossi Dossou, envoyé spécial de la Ceta auprès des Églises francophones d'Afrique de l'Ouest et centrale, a pour but d'apporter un soutien à toutes les voix qui, en RCA, s'efforcent de porter une parole d'apaisement et de réconciliation ; de faire entendre que les violences que connaît la Centrafrique ne sont pas religieuses à l'origine, et de manifester la solidarité des Églises d'Europe et d'Afrique envers les Églises et le peuple de RCA.
Elle intervient alors que Bangui a connu, ces derniers jours, divers incidents meurtriers, attisant encore plus les tensions en dépit de la présence des troupes internationales déployées dans la capitale (lire : Centrafrique : visite de solidarité à Bangui). En s'entretenant mardi avec Catherine Samba Panza, la présidente centrafricaine, présente à Paris pour 48 heures avant d'assister à un « mini sommet » sur la RCA à Bruxelles en marge du sommet UE-UA, François Hollande a d'ailleurs dû reconnaître que la « situation sécuritaire » s'était dernièrement « dégradée, détériorée, dans un certain nombre de lieux et même à Bangui ». Et ce en dépit des résultats obtenus par la force Sangaris, qui a permis notamment le « fonctionnement des services publics les plus essentiels, les écoles, l'hôpital, la prison ».
L'EUFOR RCA officiellement lancée
Cette visite coïncide aussi avec le lancement, retardé de trois semaines, de la mission militaire européenne en Centrafrique. Après avoir longtemps buté sur la difficulté à trouver un contingent d'une centaine d'hommes spécialisé dans la logistique, le principe de l'envoi de cette force de 800 à 1000 hommes a été officialisé le mardi 1er avril par un communiqué du Conseil de l'UE, qui précise que « l'EUFOR RCA doit apporter un soutien temporaire en vue de l'instauration d'un environnement sûr et sécurisé dans la région de Bangui, dans l'optique d'un passage de relais à une opération de maintien de la paix des Nations unies ou aux partenaires africains. » Cette force sera dirigée par un Français, le général de division Philippe Pontiès.
Toujours selon le communiqué du Conseil de l'UE, « les coûts communs de l'opération sont estimés à 25,9 millions d'euros pour la phase préparatoire et un mandat pouvant aller jusqu'à six mois à compter de la date à laquelle la force aura atteint sa pleine capacité opérationnelle. Les troupes d'EUFOR se déploieront rapidement afin d'obtenir des effets immédiats dans la zone de responsabilité de l'opération. »
Une annonce qui ne lève toutefois pas les questions. Le déploiement ne sera pas vraiment immédiat - il devrait s'étaler sur plusieurs semaines ; on manque encore de précisions sur les effectifs qui seront effectivement fournis par les États membres de l'UE, très réticents à cette opération et qui ont plutôt les yeux tournés vers l'Ukraine que vers la Centrafrique ; enfin, doivent être concernées en priorité des zones cruciales de Bangui, dont l'aéroport, ce qui ne règle en rien la situation du reste du pays, et notamment des nombreuses « poches » dans lesquelles se trouvent des déplacés, souvent musulmans, parfois protégés par la force Sangaris, et qu'il est tentant de vouloir regrouper dans d'autres régions moins exposées, au risque d'aller dans le sens d'une partition du pays...
Si les partenaires européens, poussés par les violences des derniers jours, ont enfin pu lancer cette opération militaire, tout reste donc à faire pour apaiser les esprits et aider le pays à se reconstruire. Ce sont précisément les thèmes du « mini-sommet » auquel participe Catherine Samba Panza ce mercredi à Bruxelles, et qui doit, selon le Conseil de l'UE, se pencher sur les moyens de « rétablir la stabilité, promouvoir la réconciliation nationale et la transition politique », tout en évoquant « ce qui peut être fait en plus en matière d'aide humanitaire et de développement ».
Franck Lefebvre-Billiez